Francis JACQUES, La mise en communauté de l'énonciation


Notes sur la notion d'énonciation
Vous trouverez dans cet article un résumé sous forme de notes de la notion d'énonciation chez Francis Jacques, utile lorsqu'on fait des recherches en sciences du langage, ou même pour passer le temps.








1.Définition de l’énonciation 

C’est «l’activité langagière exercée par les agents du discours » 
    où « les interlocuteurs s’approprient conjointement l’appareil de la langue pour énoncer leur position corrélative de co-locuteur, et employer la langue à signifier un rapport commun au monde » (Jacques, 1983:47) 
    où on « [considère] le langage sous l’optique du discours, et le discours sous l’optique de la communication » (Jacques, 1983: 50) 


2. Paradigme de la communicabilité : la relation, départ de l'entente entre co-locuteurs ? 

« L’acte par lequel la langue est mise en discours et qui est la présupposition extra-linguistique de l’énonciation ne peut se définir comme un procès d’appropriation de la langue au locuteur . Benveniste corrige […] que toute énonciation postule un allocutaire, en quoi elle est une allocution. […] Si le locuteur est co-locuteur, les deux partenaires partagent quelque peu l’initiative sémantique, et ils la partagent pour autant qu’ils sont en relation interlocutive. » (Jacques, 1983:49) 
 
« Une énonciation est signifiante pour autant qu’elle est mise en communauté entre des énonciateurs, qui sont par ailleurs en relation interlocutive. » (ibid.) 


3. La relation interlocutive : la relation passe d’abord par la reconnaissance de l’autre ? Elle se construit sur une référence commune, un certain rapport au monde commun entre deux co-locuteurs ? 

« Que le locuteur le fasse après s’être adressé à un autre qui l’écoute, après avoir été ”à l’écoute d’autrui”, […] n’y change rien, tant que c’est lui qui a la charge d’articuler son intention de sens dans le système de différences propre à la langue, et tant que c’est son propre rapport au monde qui s’élabore dans un système de significations. » (Jacques, 1983:51) 

« Allons plus loin. Ce n’est pas l’intervention du pair auditeur qui constitue le langage en communication, ni la réutilisation des termes, des phrases, prononcés par l’autre (pour les nier par exemple), qui fait la communication. Mais l’intervention de l’allocutaire en tant que co-énonciateur. » (Jacques, 1983: 51) 
    où « la première personne est privilégiée dans la mesure où elle doit être référentiellement interprétée comme le sujet conscient pourvu d’une pensée ”intérieure’ ‘ » (Jacques, 1983: 52) 

« La relation interlocutive, fonde toute situation de réciprocité par signes. Avec cette conséquence que l’énonciation est un événement de structure dialogique qui procède d’une activité relationnelle de signifier-comprendre (ou de proférer-entendre) des agents du discours » (Jacques, 1983: 52) 
    où on « [incorpore] la reconnaissance du partenaire dans l’intention de sens du locuteur. » (Jacques, 1983: 53) 
donc « présenter le procès de signification comme le procès d’un vouloir dire complexe, associant la production d’une intention chez l’un à sa reconnaissance par l’autre. L’intention de sens du locuteur impliquant, l’intention d’être reconnue est donc en quelque sorte l’intention de l’intention de l’autre. » (Jacques, 1983: 54) 


Structure de l’énonciation – dialogue 

Pour Benveniste (1), « chaque locuteur au moment de prendre la parole peut légitimement considérer le langage de son point de vue personnel. Privilège de celui qui parle .» (Jacques,1983:56) 

    où « l’énonciation est accentuation de la relation discursive au partenaire » 
    où « ”deux figures en position de partenaires [sont] alternativement protagonistes” (Benveniste, 1965:85) » (Jacques, 1983: 56) 
    où « les interlocuteurs sont des instances co-énonciatives en ce qu’ils partagent un certain nombre de présuppositions qui les placent, au moins partiellement, à l’intérieur d’une même cadre sémantique » (Jacques, 1983 : 57) 


4. Qui n’est pas ? Point du vue du philosophe 

« Locuteur et allocutaire sont des instances suscitées par et dans le discours, plutôt que des individus concrets. Le termed’ ”instance énonciative” est une terme technique que n’a aucune portée psychologisante. Même chez ceux qui l’identifie au sujet parlant, il n’est pas assimilable à l ‘ ego ou au sujet psychanalytique.» 
   
« On ne saurait confondre ni le locuteur avec le sujet parlant, […] ni l’allocutaire avec l’auditeur » (Jacques, 1983:58) 


Que dis-tu-je ? (A.F.) 

D’après Bakhtine « au moment où le langage entre dans le champ communicationnel, il se tourne en instances de discours caractérisées par un ensemble de références internes dont la clé est je-tu. » 
    où « l’énonciation ne deviendrait pleine qu’en devenant bi-vocale, plurivoque. » (Jacques, 1983 :58) 
    où « l’énonciation procède normalement d’une co-axation subtile ; « pour l’autre » et « par l’autre ». (Jacques, 1983 :59) 


5. Conjointement : une nouvelle forme de relation, obtenir l’aide de l’autre pour un nous ? 

« Une activité conjointe n’est pas une activité commune » (Jacques, 1983 :60) 

« énoncé p avec l’aide de l’autre, toujours en relation avec lui. » (Jacques, 1983 : 61) 

« Il n’y a pas d’un côté moi qui signifie et d’un autre côté toi qui comprends. Au fur et à mesure que je parle, j’écoute, ou plutôt je parle l’écoute que je te prête de ma propre parole. » (Jacques, 1983 :62) 


6. En bref : la relation au centre 

« L’instance de discours renvoie aux instances énonciatives en relation interlocutive actuelle » 

« La référence au monde devient un procès d’inter-références, qui débouche parfois sur une co-référence. » 
    où « tant l’identité que l’existence du référent reste suspendue entre les inter-locuteurs jusqu’à ce qu’ils s’accordent » (Jacques, 1983 :70) 

«Une linguistique étendue de l’énonciation. Étendue à certains faits énonciatifs qui reflètent les relations que le locuteur entretient avec l’allocutaire, ainsi que les relations entre l’énoncé et les éléments de la situation de communication. Étendue parce que recentrée sur les faits relationnels. » (Jacques, 1983 :71) 


1 BENVENISTE « Le langage et l’expérience humaine », Diogène, n°51, Galliamard 1965,p.3-13 
Bibliographie : 
Jacques Francis. La mise en communauté de l’énonciation. In: Langages, 18ᵉ année, n°70, 1983. La mise en discours, sous la direction de Herman Parret. pp. 47-71. 

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