Bernard Moitessier, La longue route

La longue route

Il existe des livres comme celui-ci qui vous emmènent très loin et vous accompagnent très longtemps. C'est souvent le cas pour les romans d'expédition pour ma part. 

De Jean-Louis Etienne à Sylvain Tesson en passant par Bernard Moitessier, je ne sais pas lequel me donne le plus à rêver. En tout cas, ce sont tous des auteurs plutôt connus, bien d'autres auteurs proposent sensiblement le même genre de récit d'expédition.

Pour vous situer le récit La longue route, nous sommes en 1968, le marin est parti depuis quatre mois de son port d'attache, Plymouth, pour faire le tour du monde et c'est à ce moment-là que la route est longue. On est au chapitre 10, il y en a 23. Son voyage aura duré dix mois.

Ce qui me touche dans ce genre de littérature, c'est la manière dont le temps est présent. On est témoin avec l'auteur de chaque instant. On vit avec le récit les tempêtes, les accalmies, les moments de doute, les joies, le calme solennel... Evidemment, la pensée divague presque tout le temps, d'autant plus lorsqu'on voyage seul comme Bernard Moitessier. 

Je crois que j'aime bien lire les divagations des esprits en chemin. Parfois, on y comprend rien, c'est tellement de l'ordre de l'intime. D'autres fois, la résonance est puissante avec le lecteur, et moi, c'est "d'écout[er] parler la forêt" qui me ramène brutalement dans le jardin de mon enfance au pied des chênes, des acacias et des bouleaux. 

Si vous n'avez jamais voyagé seul, vous pourriez essayer même d'aller au fond du jardin pour rester quelques instants sans bruit et laisser faire. C'est un univers qui s'ouvre à vous, où le temps est doux. On met les chaussures, un petit pull confortable et hop, c'est parti ! 

Une fois de plus ce n'est pas sans rappeler notre éternel petit carnet d'écriture, celui qui nous accompagne depuis  longtemps maintenant. Ici, on pourrait appeler ça un carnet de bord. Tout ce que le marin vit sur son bateau y est recensé pour ainsi dire. On y retrouve toutes les informations sur les changements de temps, de mer. Il exprime très souvent ses appréhensions, ses états d'âme et les moments extraordinaires où, au milieu de l'océan, l'univers semble se pencher vers lui.

Il est vraiment question d'un journal de bord ici, nous ne sommes pas encore tout à fait dans quelque chose d'introspectif ou de poétique, comme Sylvain Tesson peut le proposer. J'en parle dans cet article. Même s'il y a une part d'introspection dans ce texte, consciente ou inconsciente, et une façon esthétique de romancer le récit; ici, nous sommes en présence du journal sous sa forme utile : de bord.

 

A ce titre, je pense que ce qui différencie les textes est vraiment une question d'intention. Les raisons qui poussent un auteur à écrire, celles-ci sont révélatrices autant que le texte en soi. D'un côté nous avons Bernard Moitessier, navigateur, qui décide d'écrire son tour du monde à bord du Joshua, et de l'autre, avec Sylvain Tesson, nous avons un géographe-expéditeur dans une forme d'écriture de recherche poétique. J'imagine alors que l'intention d'écriture est différente et s'impose d'elle-même à l'auteur. 

Je ne sais pas si j'aurais ma réponse un jour, mais l'intention est une piste à creuser...

Si vous êtes sensible à l'écriture de notre marin Bernard Moitessier, vous pouvez vous rendre sur le site officiel qui lui rend hommage, puisqu'il a vécu de 1925 à 1994 : Bernard Moitessier. 

Depuis très longtemps, je n'ai pas remis les pieds dans les rayons de récits de voyage alors je n'ai que La longue route à vous conseiller de cet auteur. J'avoue être plutôt concentrée depuis un certain temps sur la littérature de jeunesse. Mon dernier "contretemps" en librairie était aux éditions Magellan & Cie, la Librairie du voyageur dans le XVIII (Paris). A vrai dire, j'y ai quand même trouvé un livre de Hubert Delahaye, Histoires de mers, mais je garde ça pour un prochain article. Je pense partager également avec vous les livres pour enfants qui m'ont bien plu ces derniers mois.

Si ça vous tente, à bientôt !